Quatrième de couverture

Edgard, physicien connu, propose à Hélène, jeune journaliste, d’écrire avec elle un ouvrage de vulgarisation. Rapidement, l’entreprise savante, organisée à jour et heure fixe, se mue en une longue confidence qui les entraîne dans la spirale historique du siècle: l'homme mûr explore les épisodes d'un passé qu'il voulait oublier.
Edgard a été un enfant caché pendant la guerre. Ses parents, juifs de l’Est, communistes militants, engagés dans les brigades internationales pendant la guerre d'Espagne, résistent dès la première heure à l'occupation nazie. Son père disparaît dans les camps de concentration. Sa mère, toujours animée d'une foi vibrante dans l'idéal communiste, imagine en 1952 d'aller vivre en Pologne. Ce sont les années de plomb staliniennes. La réalité est insupportable. Piégés, le mère et le fils devront leur survie à leur extraordinaire capacité d’adaptation et d’imagination.

Hélène, la journaliste, est partie d’une question innocente : quel est le lien entre l’élaboration d’une pensée scientifique et le parcours humain de son auteur ? Mais pour elle qui dévide le fil rouge de ces récits imbriqués, c’est une initiation inattendue à des réalités historiques qu’elle préférait ignorer, à quelques notions pointues de cosmologie et, doucement, à la découverte d'elle-même.

Histoire et considérations scientifiques forment la toile de fond d’un suspense psychologique. Avec cette perspective particulière: les événements sont lus à la lumière des recherches du professeurs sur l'origine de l'univers à partir du vide quantique.
Toute ressemblance avec les deux auteurs n’est pas exactement une coïncidence. Mais, de leur talent et de leur maîtrise conjugués, naît un couple de fiction remarquable, une leçon époustouflante d’humanité, d’humour et de philosophie.  

Extraits de presse

Edgar Gunzig n'est pas seulement l'un des plus brillants cosmologues contemporains, physicien belge, ancien élève du prix Nobel Ilya Prigogine, auteur d'un concept - le « bootstrap » - qui ouvre de nouvelles perspectives sur l'origine de l'univers. C'est aussi un homme à la destinée tragique et miraculeuse, l'exact contraire du professeur Nimbus en chambre, dont un roman singulier, sensible et prenant, retrace l'itinéraire.

Hervé Bentégeat – Le Figaro – 17/11/2004

 

Un physicien, sauvé par les mathématiques, déploie son incroyable vie au cours d'une rencontre, qui est aussi l'occasion de redécouvrir le passé de sa famille. Le plus étonnant est qu'Edgar, avant cette rencontre, ignorait pratiquement tout de la vie de ses géniteurs. Il a donc dû fouiller dans ses souvenirs et dans les livres, puis rencontrer quelques témoins pour redécouvrir son passé. Dans le roman comme dans la réalité. Cette sorte de mise en abyme conduit le héros, comme l'écrivain, à une complète reconstruction personnelle.

Davie Larousserie – Sciences et Avenir – novembre 2004

 

Fils d'une pasionaria du communisme, la grande figure du livre, il naît sous les bombes pendant la guerre d'Espagne, perd son père dans les camps, vit la guerre en enfant caché. Il suit ensuite sa mère en Pologne pour vivre le communisme, passe les frontières en clandestin et se retrouve dans l'univers kafkaïen des geôles indiennes. Haletant.

Avantages – novembre 2004

 

Roman, certes (c'est écrit sur la couverture), mais né des conversations entre la journaliste passionnée de science et le physicien qui remet en cause la théorie du big bang. « Relations d'incertitude » évite les développements scientifiques trop ardus, préférant se consacrer aux expériences marquantes de la vie du physicien qui l'ont amené à émettre son étonnante théorie.

Technikart – décembre 2004

 

Drôle d'objet que ce pavé de presque 600 pages qui oscille entre le roman, la biographie, l'autobiographie et le traité de vulgarisation scientifique. Pari gonflé – et admirablement réussi.

Gwendoline Raisson – Zurban – Septembre 2004

 

Edgar Gunzig démêle dans ce « roman » les liens entre son parcours intellectuel de physicien et sa tumultueuse histoire personnelle. Les aller-retour entre des concepts scientifiques (les fluctuations du vide quantique y sont mises à la portée de tous!) et la construction de sa personnalité, marquée par une adolescence en Pologne ou un séjour carcéral en Inde, donnent une rare vision de la science en marche. Passionnant.

Science et Vie – novembre 2004

 

D'une plume lumineuse, précise et non dénuée d'humour, Elisa Brune nous guide dans cette aventure où le suspense psychologique dame le pion au mystère du vide quantique. Edgar Gunzig, coauteur du livre, est un éminent docteur en sciences de l'ULB. La plupart des éléments de ce récit sont d'ailleurs autobiographiques. C'est ce livre de prime abord peu facile que les jeunes ont élu Prix Rossel des jeunes 2004. Un choix fondé, comme beaucoup l'ont expliqué, sur l'extrême richesse du propos.

Télémoustique – 29/12/2004

 

Quel est le lien entre l'élaboration d'une pensée scientifique et le parcours humain de son auteur? Avec une plume décidément agile et vagabonde, Elisa Brune esquisse une réponse à la fois claire et nuancée. Plus que la maîtrise d'un sujet scientifique complexe, c'est la densité d'une histoire émotionnelle peu banale et une approche inattendue des réalités historiques qui rend ce récit haletant.

Olivier Stevens – La Libre Match

 

Les mathématiques peuvent sauver la vie. De 1952 à 1956, elles ont sans doute évité au jeune Edgar Gunzig de dépérir.

Ce livre mâtiné de cosmologie explore la trajectoire intime d'un homme marqué par le siècle. Passionnant.

Ciel et Espace – septembre 2004

Premières pages

Je ne sais plus pour quelle raison j’errais dans ce couloir, quelle peine de cœur ou grève de métro m’avait laissée vacante sur le campus, alors que mon emploi du temps habituel était plutôt du genre optimisé. J’entamais ma dernière année de journalisme et je me demandais à quoi j’allais pouvoir consacrer ma plume une fois que ce fichu diplôme aurait rejoint, dans ma boîte à archives, le tiroir étiqueté « documents officiels » qui résumait ma position face à l’administration du pays. Pendant trois années d’études, une attention assidue portée aux journaux écrits, parlés et télévisés m’avait amenée à la conclusion que rien ne valait une bonne bande dessinée. L’actualité me donnait la nausée. J’avais remarqué, en feuilletant des magazines parus sur un laps de vingt ans, que la presse semblait condamnée à se répéter en boucle et ça me fatiguait. J’avais envie de linéarité.

Arrivée à hauteur de l’amphi 2215, je tombai sur une animation insolite pour cette heure tardive. Une conférence, peut-être ? Je m’approchai de l’affiche apposée sur la porte. « Naissance et destin de l’univers, une quête sous le signe du vide quantique, par le professeur Edgard G. ». Cette annonce fit sur moi l’effet d’une pluie de confetti. On changeait de monde, on zappait vers les cimes. L’univers, certes, je n’en ignorais pas l’existence, mais qu’il pût naître ou mourir ne m’avait jamais effleuré l’esprit. Est-ce que le moustique interroge les destinées cosmiques? Cependant, la fraîcheur de ces idées me sortait d’une torpeur maladive – je pouvais presque entendre dans mon cerveau le crépitement de l’influx électrique. Univers, destin, naissance, quête, vide, enfin de vraies questions, qui rompent le refrain assommant des insignifiances quotidiennes. Et, avec le mot quantique, on atteignait franchement l’ivresse poétique – je parle de la poésie dense et joufflue émanant des concepts dont vous ne pouvez douter qu’ils sont chargés de sens. Voilà qui réclamait mon attention. J’entrai.

Il y avait un monde fou dans la salle imposante prévue pour les grands événements et les cours de première année. Je dus faire lever une demi-rangée pour atteindre l’une des dernières places libres – d’où il serait tout à fait impossible de m’extraire si le sujet devenait casse-pied. Mais au nombre des amateurs qui avaient affronté le problème du parking dans un quartier absolument impraticable, on pouvait juger l’événement particulièrement prometteur. Les deux allées latérales furent bientôt encombrées d’auditeurs assis sur les marches. Les derniers arrivants devaient se placer debout de part et d’autre de l’estrade, se maudissant de s’être mis en route si tard.

Déjà installé en scène, assis derrière une table et concentré sur ses notes, dont il ne tournait pourtant jamais la première page, se tenait un homme auréolé de boucles blanches, complètement indifférent au brouhaha qui venait lécher l’estrade comme une marée. Il devait mettre au point la structure interne de son exposé, articuler les enchaînements, boulonner les premières phrases, bref inspecter l’architecture de l’édifice au seuil duquel nous étions déjà massés, attendant la visite. C’est à peine s’il leva les yeux lorsqu’un officiel prit la parole pour introduire la séance, et l’on comprit qu’il restait retenu dans ses travaux d’aménagement intérieur, hochant mécaniquement la tête à l’énoncé de ses titres, comme il aurait sans doute continué à le faire s’il écoutait la recette du cake aux pommes. 

Dès qu’il ouvrit la bouche, je tombai sous le charme. Je parle non de son charme à lui, car sa personnalité restait dissimulée sous le discours, mais de l’invraisemblable attrait qu’il conférait à la physique. C’était bien la première fois que la science prenait pour moi les couleurs d’une aventure. Mes terribles difficultés à surmonter les cours de l’enseignement secondaire, et le dégoût qui s’en était suivi, ne m’avaient pas préparée à une révélation de cet ordre. Mais je suis obligée de le reconnaître : comprendre la gravitation universelle, ce soir-là, marqua un tournant de mon existence.